J’ai testé pour vous : avoir 28 ans

Faire le bilan, c’est se retourner sur ce qui vient de se passer et sur ce qui est à refaire ou à revoir. Quand je fais le bilan avec un élève, c’est pour qu’il s’améliore, qu’il progresse. Alors faire le bilan d’une année, ça serait pour pouvoir progresser ? Pour pouvoir changer les choses en cours, pour voir les progrès.

Mais la vie n’est pas une évaluation par compétences. Je ne pourrais pas me rattraper si j’ai raté un moment, je ne peux pas revenir en arrière.

Pourtant, faire le bilan est essentiel pour moi chaque année. Car je passe encore une année. Et chaque année, je fais le bilan. C’est mon petit rituel.

Cela fait maintenant quelques jours que j’ai 28 ans. Et comme tous les mois de janvier, j’ai toujours du mal à passer ce cap. Des questions profondes reviennent et parfois, m’empêche de progresser.

Mes 27 ans, c’était pas mal quand même.

Je me suis mariée avec un homme en qui je crois profondément, que j’ai cherché longuement. J’ai consolidé de nombreuses amitiés au détriment de certaines, mais finalement, j’ai arrêté de me prendre la tête pour les autres et j’ai arrêté de voir des personnes qui ont passées beaucoup de temps à me juger sur ma manière d’être, de vivre à Paris ou d’être en couple. J’ai gagné plus d’argent, mais bon, ça c’était facile, je suis passée d’étudiante à prof. J’ai voyagé pendant un mois à l’étranger. Un étranger proche tout de même, on s’est contenté de l’Italie. Bah oui, hein, on avait de l’argent, mais pas non plus pour faire le tour de monde et payer un mariage à la fois. J’ai arrêté de prendre des pincettes avec ma mère, je me suis rapprochée de mon père et je vois plus mes nièces et ma sœur.

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J’ai quelques regrets, quelques amertumes, mais finalement, est-ce qu’on peut tout réussir à la fois ? On ne va pas nier le fait que l’année 2014 a été une très belle année. Ce genre d’année gravée sur une alliance, ce genre d’année dont tu regardes les photos, où tu as envie de te souvenir. Toujours. Tout le temps.

Et puis 2015 et mes 28 ans sont arrivés. Je ne vais te mentir, en relisant certains posts, j’ai parfois l’impression d’être une petite ingrate. Une petite ingrate de la vie, qui continue de se plaindre de tel phénomène. Une petite ingrate qui ne dort pas la nuit alors qu’elle a tout. Un peu comme cette chanson de Stromae, qui dit « Tu as tout, mais tu n’as pas sommeil« . J’ai commencé mes 28 ans par une tuerie dans un supermarché casher, et je m’en suis sentie vraiment bouleversée. Je ne peux pas vous expliquer les incidences que cela a, mais c’est encore quelque chose qui me glace le sang, qui me montre que 2015, ça va pas être top top.

Et puis il y a eu d’autres signes chez mes proches, des deuils soudains, des mauvaises nouvelles, une sorte de latence. J’ai l’impression que tout le monde est au ralenti, que tout le monde se cherche une raison de progresser, de vivre. Sauf, qu’ils cherchent mal. Je vois des jeunes gens bien sous tous rapports, qui se lancent dans des carrières, dans des heures de boulot, sans coupure, des gens qui sont au bord du burn-out. Et j’ai envie de dire « WTF? ». Il faut vraiment faire ce genre d’horaire pour se sentir intégré ? Mais intégrer à quoi d’ailleurs ? C’est quoi notre modèle de réussite quand on voit des gens de moins de trente ans en train de prendre des cachets au lieu de prendre du recul ?

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Je fais d’ailleurs partie intégrante de cette espèce. Une espèce de jeune de moins de 35 ans en train de travailler à en perdre pieds, comme si la reconnaissance et le bien-être passaient par le travail. Et comme un phénomène en entraîne un autre, le fait d’être au tant dans le travail me fait oublier à quel point je suis bien entourée.

Pour mes 28 ans, je me suis offerte une analyse. Ouais. C’est glam.

Pour mes 28 ans, j’ai commencé à voir un psy, pour parler, pour faire le bilan, pour faire sortir les non-dits et tout le reste. Je ne prends pas de cachets, je ne suis pas au bord du suicide, mon couple n’est pas en train d’exploser. Mais je vois un psy car au fond, j’ai pas mal de choses à régler avec moi-même.

Et pas avec mes proches.

Enfin, si, ils sont partie intégrante de cette prise en considération. Mais finalement, eux aussi, ils font leurs chemins et j’ai bien peu d’incidence là-dessus.

Alors qu’est-ce que je me souhaite pour 2015 et pour mes 28 ans ?

Je me souhaite du bonheur, beaucoup de bonheur. Je me souhaite une relation construite et harmonieuse avec Grumpf, je me souhaite de ne pas vivre une grande catastrophe. Je me souhaite des voyages, je me souhaite un déménagement. Je me souhaite des amis, je me souhaite de voir tous mes amis. Je me souhaite des rencontres, de belles découvertes et surtout de l’ouverture d’esprit. Je me souhaite aussi des projets à deux, je me souhaite de ne penser qu’à ça finalement. Je me souhaite d’être égoïste, de savoir dire « non » quand je le pense, de savoir prendre du recul sur des situations où je ne suis pas celle qui détermine le futur des autres. Je me souhaite des fous rires, des folies et surtout beaucoup de moments improvisés, parce que c’est ça qui fait la saveur de ses moment d’amitiés.

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Je me souhaite finalement rien qui ne concerne mon travail. Même si j’ai envie d’un poste fixe, même si j’ai envie de faire mes preuves, est-ce là qu’est l’essentiel ? Oui et non.

Oui, parce qu’être bien dans son métier, c’est réussir à donner envie aux autres de se dépasser. Surtout quand les autres ont entre 11 et 18 ans. Si j’ai envie de faire les choses biens, c’est surtout parce que j’ai un public. C’est peut-être une mauvaise façon de raisonner, mais pour l’instant, c’est mon mode de fonctionnement.

Non, parce que mon travail est chronophage et ne me permet pas de réaliser mes souhaits du dessus.

Le travail reste une contrainte, même si celui-ci peut parfois être une passion.

Pour mes 28 ans, je me souhaite finalement de trouver mon équilibre, entre mon Amour, mes amis et mon travail.

Et ça sera déjà pas mal.

(Et je veux bien aussi quelques gros kiffs par mois. Merci d’avance. )