Montrer son corps l’été : un défi ?

Aaaaah l’été !

La chaleur, le soleil, les longues soirées avec les amis, les jours fériés, les vacances, la chaleur, le soleil, la chaleur… La. Chaleur.

Cette même chaleur qui te pousse à ranger ton jean fétiche, tes boots et tes chaussettes licornes. Et forcément, te pousse à avoir un mouvement inverse et proportionnelle à la chaleur : montrer tes jambes, raccourcir tes t-shirt, montrer tes pieds.

Et là c’est le drame.

J’adore cette photo très années 90…

Mille questions t’envahissent et te voilà en train de douter : est-ce que l’été c’est aussi cool que ça, ou est-ce que je vais devoir vérifier mes poils chaque jour et chaque minute et rentrer mon ventre sur la plage ? Vais-je accepter que la raclette du 10 décembre se voit dans ma cuisse gauche quand je lève la jambe  (si, si je te jure !) ?

Je suis bien-sûr concernée par ces questions. Loin de moi l’idée de te dire simplement « Non mais ma Cocotte, t’inquiètes pas, on est toutes différentes, c’est trop cool. » La pression sur le corps de la femme, et surtout l’été, est encore plus important. Et je pourrais rajouter aussi sur le corps de l’homme, même si je n’ai pas expérimenté.

Prenons un exemple simple : un dimanche à la mer.

Grumpf et moi, forts des concessions sur le dimanche, nous décidons de partir à Deauville (bon en vrai, Honfleur) pour profiter d’un dimanche au frais. Dis comme ça, ça fait un peu Parisien Bobo. Mais en vrai, c’est cool.

Je mets les pains de glace au congélo la veille au soir, je mets le réveil. Et là, gros doute, voire légère panique : OH PUTAIN JE VAIS ME METTRE EN MAILLOT DE BAIN ! DEMAIN !

Tu me diras : pourquoi paniquer ? Accepte toi comme tu es et les autres t’accepteront. Oui, oui, bien-sûr.

Mais là, en ce samedi soir, il est 23 heures, tu as mis ta culotte « Petit Bateau » (ça fait bien longtemps qu’il n’est plus petit, ton Bateau… ), et tu te dis « Ok, Cocotte, demain, tu vas te montre à moitié nue sur une plage « … INSPECTION !

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C’est là normalement, où l’homme que tu as choisi entre en scène. Il te rassure, te dit qu’il n’y as pas de problème, que tu es trop canon dans ton maillot et que de toute manière, personne ne peut avoir tes seins. Ok. J’avoue. Les arguments sont imparables.

Puis tu te souviens que l’épilation et toi, ça fait deux. En hiver, la pression sociale, tu t’en fous un peu et comme Grumpf s’en moque encore plus, tu te laisses un peu aller. Bon, sauf sous les bras, parce que ça, tu ne peux vraiment pas. Mais les jambes ont eu le temps de pousser (enfin les poils). Tu te dis que ça fait quand même plus propre, alors quand il a commencé à faire beau, tu vas te faire épiler. Mais c’était il y a quinze jours et te voilà, samedi soir 23h20 avec ta pince à épiler, en train de chasser les trois poils qui se battent en duel sur ta pauvre jambe toute blanche.

Et l’épreuve tant redoutée arrive. Tu es avec Grumpf sur la plage. Il est 15h25. Tu vois le petit Kevin faire des pâtés de sable, il y a du vent, mais il fait 30 degrès. Tu vois au loin la mer, car oui, à cette heure-ci, elle est un peu loin. Tu marches pieds-nus sur cette plage, seule, face à la mer (tu peux chanter !). Bon les coquillages te font mal aux pieds, mais on s’en fout, t’es plutôt bien.

Grumpf te regarde amoureusement, il est heureux, on est dimanche et on n’est pas en train de s’engueuler. On est dehors. Il se met en maillot de bain et vous allez courir ensemble vers cette mer rafraîchissante. Comme dans les films. Vous êtes seuls au monde parmi toute une foule d’inconnu en maillot de bain. Ton cerveau est bien.

STOP !

Parce que jusque là tu étais en mode automatique, amoureuse et heureuse, re-voilà ton cerveau qui revient pour réinterpréter le monde social.

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Depuis mon enfance, on m’a appris la pudeur. « Ne montre pas ta culotte », « Ne soulève pas ton t-shirt », « Mets quelque chose sur ton dos ». Ces petites phrases qui te façonnent au moment de ta petite enfance et qui viennent en ritournelle au moment de l’été.

Et d’un seul coup, tu es au milieu de gens, en maillot de bain, qui cachent ce que mes parents ont appelé « l’intimité » .

Et puis, je me souviens de mon adolescence. Des premiers étés à se mettre en maillot, à vérifier que le corps des autres est bien le même que le sien.  Ah tiens, Jacqueline a un sein plus gros que l’autre, est-ce que moi aussi ?

Ces questions sur le corps, sur sa normalité, sur la comparaison avec les autres. Tu le sais, on se pose tous ces questions.

On est dimanche 29 juin 2015, j’ai 28 ans, je suis mariée et je me retrouve à réfléchir comme quand j’avais 15 ans. Est-ce que mon maillot me va bien ? Est-ce que je suis bien épilée ? Est-ce que je n’ai pas de poils qui dépassent du maillot ? Est-ce que j’ai de la cellulite ? Tiens, je me suis jamais posée cette question.. Est-ce que mes fesses bougent quand je marche ?

persopolis

J’ai 28 ans et je matte les corps autour de moi pour savoir si je suis dans une quelconque norme. Mais qu’est-ce qui me dérange au fond ? Au fond, c’est bien l’interrogation qu’il y a sur mon corps et surtout sur la représentation que j’en ai. On a tous une interprétation de notre corps souvent tronquée. Je pense que je suis comme ci, je pense que je suis comme ça. Et là, sur la plage, je passe aux travaux pratiques.

Je pense que le fait de voir des corps différents des miens m’aide aussi à m’accepter. C’est comme le jour où j’ai découvert que ma copine super mince avait des vergetures. Ca m’a tranquillisée.

Quand j’ai vu tous ces corps sur la plage de Deauville, je ne me suis pas sentie hors norme. Je me suis sentie comme une fille de 28 ans, avec un corps qui a déjà un peu vécu. J’ai quelques bourrelets, mais j’ai des mollets très musclés. Je n’aime pas mes bras, mais j’ai une très belle poitrine. J’adore mon visage, ma bouche, mes cheveux, mais je n’aime mes cuisses.

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J’ai souvent complexé sur mes kilos en trop. (ici pour mon blog, ou ici chez Mademoiselle Dentelle)

J’ai très souvent complexé, parce que je ne répondais plus à la norme de la taille fine, des seins bien fermes et du jean taille 38. Je me suis souvent dit que cela devait être horrible de me regarder. Que par rapport à tous ce que je peux voir dans les magasines ou chez mes copines, j’étais même difforme.

Je n’ai presque plus ce sentiment depuis maintenant deux ans. Je le ressens dans certaines soirées, où je ne me sens pas à ma place, soit parce que le milieu est trop « cadre sup’ » pour moi, ou parce que les filles passent un temps fou sur l’apparence. Je suis coquette, je suis féminine et j’ai mis du temps à accepter ce corps, mais les démons peuvent parfois revenir au galop.

Sur la plage, à Deauville, je me suis mise en maillot de bain. J’étais extrêmement bien. Dans l’eau comme sur le sable. J’ai arrêté de me poser des questions sur ce que les autres pouvaient voir et je me suis plongée dans une après-midi en amoureux.

Au moment de repartir de notre sieste sur la plage, Grumpf m’a dit une toute petite phrase qui m’a fait sourire : «  Tu crois que je devrais faire de la muscu ? Parce qu’il y a vachement de mecs carrés ici…  » Je me suis dit que si lui ressentait ça, alors qu’il est absolument parfait à mes yeux, c’est que je devais être absolument parfaite pour lui et que finalement, c’est ce qui comptait profondément.

Et parce que finir sur des paroles de licornes et paillettes, ce n’est pas vraiment moi, rappelons nous de ce magnifique GIF qui répond au premier :

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